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Littérature à Voix Haute - Apollon sonore
8, rue Vigor, 14 960 Asnelles - tél. 02 31 22 83 81

A propos des lectures de Noël 2013


« Pour être traduite par la voix, comme pour être saisie, la poésie exige une sainte attention. Il doit se faire entre le lecteur et l'auditoire une alliance intime, sans laquelle les électriques communications des sentiments n'ont plus lieu. Cette cohésion des âmes manque-t-elle, le poète se trouve alors comme un ange essayant de chanter un hymne céleste au milieu des ricanements de l'enfer. »
Balzac, Illusions perdues.

« Nous ne mettons jamais dans nos conservatoires
Que des cœurs pleins de vide et de précisions. »
Péguy, Eve.

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PRÉSENTATION DES LECTURES DE NOËL 2013

    « Jeunesse et foi ». Honoré de Balzac (1799-1850), Charles Péguy (1873-1914).
  Les plus fidèles de nos spectateurs savent que Littérature à Voix Haute (qui songe à s'adjoindre l'appellation « Apollon sonore » – beau titre d'un ouvrage de Georges Dumézil) s'efforce, au fil des années et à la mesure de ses moyens, de leur proposer une sorte de panorama de la littérature, sans souci de 'traiter' telle ou telle problématique, ni d'aborder avec un esprit de système quelque thématique que ce soit.
    Une fois encore, avec Balzac, fondateur du roman 'réaliste' qui entendait faire « concurrence à l'état civil », et avec Péguy, militant pour un socialisme chrétien, cette variété (comme aurait dit Paul Valéry) semble y trouver son compte :
    Illusions perdues est un roman d'initiation (élaboré sur plusieurs années, mûrement réfléchi) qui brosse (entre autres) un tableau cinglant de la presse.
    La Tapisserie de Notre-Dame est un poème – écrit d'un coup, sans esquisse ni brouillon ! – , c'est une prière : Charles Péguy y rapporte le pèlerinage qu'il fit à la Cathédrale de Chartres en 1912 à la mort d'un jeune homme de sa famille, victime d'une overdose.

    Mais au-delà de ces dissemblances qui, somme toute, sont formelles et bien schématiques, Balzac et Péguy se rejoignent ; (nous ne nous y attendions pas !), ils convergent.
    Avec Illusions perdues, Balzac, dit quelle peut être l'ardeur de la jeunesse au sortir de l'adolescence, son Idéal, mais aussi la fragilité d'une détermination peu ou mal fondée, quelles en sont les épreuves, et, le plus souvent, les déroutes – qui ne sont pas nécessairement tragiques, elles peuvent être simplement banales. Le héros d'Illusions perdues, Lucien de Rubempré, fait l'apprentissage de la dure loi du réel.
    Péguy, justement, compose cette « Tapisserie » en hommage à l'un de ces jeunes gens, fervents sans doute, mais égarés, et dont la destinée semble court-circuitée (cela arrive à chaque génération).
    Et comme Balzac (comme Dickens aussi – dans le Chant de Noël), Péguy voit les « plis », les rides que laisse sur les fronts et les âmes, la résolution de ce passage de l'enfance à l'âge adulte.
    Il ne s'agira pas d'effacer ces plis (pas même de le souhaiter), mais de les porter sans amertume, vaillamment même. « Avec gaieté » dit Balzac, « avec honneur » dit Péguy.
    « Jeunesse et foi » est une formule tirée d'Illusions perdues ; ne s'attendait-on pas à la trouver plutôt sous la plume de Péguy ?



T.S.